Si vous êtes né dans les années 70-80, il y a de très fortes chances que vous soyez dépourvus de votre appendice… Dans ces années-là, on opérait 30 fois plus qu’aujourd’hui, en enlevant cet appendice à la moindre douleur abdominale. Les recherches médicales et les nouvelles technologies ont fait chuter le nombre d’opération. Selon Le Figaro, en 1986, 300 000 personnes subissaient cette ablation, contre 83000 en 2012.
Cet appendice que l’on pensait inutile à notre corps pourrait finalement exercer une influence sur notre longévité… Selon une récente étude de l’Inserm, l’appendice n’est pas une structure inutile et serait corrélé à un allongement de la durée de vie. Décryptage.
La faute à Darwin ?
En 1871, Charles Darwin décrit l’appendice comme un « vestige insignifiant », un morceau oublié d’un organe qui aurait diminué avec le temps. Cet organe aurait été réduit à ce petit bout de chair à la suite des changements de régimes alimentaires au fil du temps. Depuis lors, on pense donc toujours que cet organe ne sert à rien.
Une étude française qui interroge
L’appendice iléo-cæcal est une petite excroissance de la première partie du côlon, le cæcum. Lorsqu’il gonfle à la suite d’une infection, il peut provoquer une péritonite, une infection qui nécessite une opération en urgence et peut entraîner la mort. Michel Laurin, paléontologue au Muséum national d’histoire naturelle a étudié avec Éric Ogier-Denis, chercheur à l’Inserm, la relation entre l’appendice et la longévité de certains animaux.
Selon eux, l’appendice présent dans le corps de certaines espèces animales leur permettrait de vivre plus longtemps. 317 espèces animales ont été passées au crible: 43 espèces possédaient un appendice, 274, n’en n’avaient pas. Cette analyse a montré que l’organe était apparu 16 fois au cours des dernières 80 millions d’années; pour une seule espèce, il a complètement disparu. En revanche, les chercheurs ne parviennent pas à déterminer les causes de l’apparition de cet appendice chez certaines espèces.
L’appendice permettrait de vivre plus longtemps ?
Michel Laurin cherche depuis des années le lien existant entre cet appendice et les conséquences sur les animaux. Et c’est avec l’aide d’Eric Ogier-Denis, spécialiste des maladies inflammatoires de l’intestin qu’il va trouver un début de réponse. Sceptique au départ, Laurin accepte cependant d’étudier la théorie d’Ogier-Denis, qui pense que l’appendice peut avoir une corrélation avec la longévité.
Ce dernier se base sur la théorie du vieillissement de George Williams (1957). Celle-ci avance l’hypothèse que la mortalité élevée d’une espèce n’est pas seulement le résultat d’une sélection naturelle. Les chercheurs français ont eu l’idée d’étudier cet appendice, car son ablation révèle quelques conséquences. Les personnes ayant déclaré une appendicite ne développent par exemple jamais de rectocolite (maladie inflammatoire chronique). En revanche, ceux à qui on a retiré l’appendice « par complaisance ou ignorance », seraient plus susceptibles de développer des infections intestinales. L’appendice pourrait donc réduire la mortalité en renforçant le système immunitaire.
L’étude chez les animaux
258 mammifères ont donc été observés en comparant la longévité des animaux de même poids: d’un côté les mammifères avec appendice, de l’autre ceux qui n’en possèdent pas. En théorie, on peut penser que des animaux de même poids devraient avoir une espérance de vie semblable. Or, toujours d’après les chercheurs, ceux qui ont un appendice vivraient bien plus longtemps que les autres. Concrètement, cet appendice protègerait les espèces de diarrhées infectieuses, cause importante de mortalité chez les mammifères. Mais également chez les enfants de moins de 5 ans: selon l’OMS, la diarrhée infantile est la deuxième cause de mortalité dans le monde.
L’appendice permettrait donc, par sa forme de « ver », de protéger l’intestin des bactéries infectieuses. Cela ne veut pas dire que les personnes n’ayant plus d’appendice vivront moins longtemps, mais qu’elles seront plus sujettes à des maladies infectieuses pouvant provoquer le développement de certaines maladies intestinales.