Des chercheurs de l’École polytechnique fédérale de Zurich (ETH Zurich) ont mis au point une nouvelle méthode de production de carburant neutre en carbone, lequel est destiné principalement aux moteurs à réaction. Des essais ont à cet effet été menés dans l’enceinte de l’IMDEA Energy Institute, en Espagne. Le concept repose sur la transformation de l’eau et du dioxyde de carbone en un substitut du kérosène (ou du diesel) par le biais de l’énergie solaire thermique. La production se passe dans une tour à réacteur. L’infrastructure est composée de panneaux réfléchissants qui suivent le cycle du soleil et redirigent ses rayons vers le réacteur situé au sommet de la tour. La chaleur accumulée est indispensable pour le processus de conversion des intrants en carburéacteur.
Une installation tout-en-un
Cette découverte constitue un espoir pour la réduction des émissions de CO2 dans un domaine où le niveau de pollution est particulièrement élevé. À noter qu’un article détaillant la recherche a été publié dans la revue Joule le 20 juillet dernier. La tour pilote fait à peu près 15 mètres de haut. Elle abrite un réacteur en céramique à son sommet. Ce dernier fonctionne grâce à l’énergie solaire captée par 169 panneaux solaires de 3 m² chacun. Le réacteur reçoit ainsi au minimum environ 50 kW d’énergie solaire thermique.
Cette énergie alimente les cycles de réaction d’oxydoréduction (redox) dans le réacteur qui renferme une structure poreuse en oxyde de cérium. Cet oxyde, à son tour, convertit l’eau et le CO² pur en gaz de synthèse. Le gaz obtenu est introduit dans un convertisseur « Gas-to-Liquid (GtL) » pour devenir du kérosène ou du diesel, en fonction des besoins.
« Nous sommes les premiers à démontrer l’intégralité de la chaîne de processus thermochimique, de l’eau et du CO2 au kérosène, dans un système de tour solaire entièrement intégré. (…) Cette usine de carburant à tour solaire a été exploitée avec une configuration adaptée à une mise en œuvre industrielle, posant ainsi un jalon technologique vers la production de carburants aéronautiques durables. L’usine de carburant à tour solaire décrite ici représente une voie viable pour la mise en œuvre à l’échelle mondiale de la production de carburant solaire » Aldo Steinfeld, professeur à l’ETH
Un rendement énergétique de moins de 5 %
Les premiers essais de production de carburéacteur neutre en carbone menés par l’équipe ont été réalisés en laboratoire, dans le cadre du projet SUN-to-LIQUID de l’Union européenne. Un test « grandeur nature » a également été effectué pendant 9 jours. Le rendement énergétique a atteint 4 %. Un résultat qui est loin d’être satisfaisant, mais cela prouve au moins que le concept fonctionne. D’ailleurs, les chercheurs sont déjà à pied d’œuvre pour améliorer l’efficacité énergétique de leur infrastructure.
Vers une amélioration des résultats
Des recherches supplémentaires sont ainsi en cours dans le but de viser un rendement de plus de 15 %. Parmi les changements envisagés pour permettre d’atteindre un tel exploit, l’équipe prévoit de modifier la structure de l’oxyde de cérium afin qu’il absorbe mieux le rayonnement solaire. D’après le professeur Aldo Steinfeld de l’ETH Zurich, le carburéacteur neutre en CO2 produit pourra être mélangé avec du carburant classique. Une possibilité qui devrait aider à réduire l’empreinte carbone de nos voyages aériens… Plus d’informations : ETH Zurich