Si, aujourd’hui, nous parlons de l’Ukraine, pour le conflit armé qui s’y déroule, hier, le pays était celui de la plus grande catastrophe nucléaire de tous les temps en termes humains et environnementaux. Souvenez-vous du 26 avril 1986, le réacteur numéro 4 explosait en quelques secondes ! Un accident causé par une combinaison d’erreurs humaines et de défauts de conception du réacteur. Au cours d’un test de sécurité, les opérateurs ont commis une série d’erreurs qui ont entraîné une brusque augmentation de la puissance, provoquant une explosion de vapeur et l’incendie qui s’en est suivi. L’explosion a libéré de grandes quantités de particules radioactives dans l’air, qui se sont répandues dans une grande partie de l’Europe. Récemment, des chercheurs américains se sont penchés sur l’impact de l’explosion sur les chiens errants, et c’est assez étonnant. Découverte.
Tchernobyl, un impact mondial
Près de 40 ans après, cette catastrophe a toujours des répercussions sur les terres abandonnées de leurs habitants, et qui ne seront, à priori, plus jamais réhabitées. Plus de 300 000 personnes ont été évacuées et une zone d’exclusion de 30 km a été établie autour de la centrale. Cette explosion avait entraîné la mort immédiate de deux travailleurs de la centrale, et 28 autres personnes sont décédées des suites d’une maladie radioactive aiguë dans les semaines qui ont suivi. On estime que jusqu’à 4 000 cas supplémentaires de cancer pourraient directement être attribués à l’accident, et les effets à long terme sur la santé sont encore en étude. La zone reste fortement contaminée et le restera pendant des milliers d’années. Les chiens errants, eux, sont restés sur place et se sont reproduits. Timothy Mousseau (Université de Caroline du Sud, Columbia, États-Unis), Elaine Ostrander (NIH, Bethesda, États-Unis) et leur équipe ont étudié 302 chiens errants pour tenter de connaître l’impact de l’exposition aux radiations nucléaires.
Comment ont-ils mené cette étude ?
Les chercheurs ont caractérisé la structure génétique de 302 chiens représentant trois populations canines en liberté vivant dans la centrale elle-même, ainsi que celles situées à 15 à 45 km du site de la catastrophe. Les génomes des chiens de Tchernobyl seraient génétiquement distincts des chiens plus éloignés de la centrale nucléaire, comme ils l’expliquent dans l’étude parue sur Sciences Advances. Cette étude avait été lancée en 2017, à cause d’une augmentation importante des chiens sauvages, estimée à environ 800 individus dans le périmètre de la centrale nucléaire. De 2017 à 2019, 302 échantillons de sang ont été prélevés dont 132 issus directement du site de la centrale.
Que révèle cette étude ?
Selon les premiers résultats de cette étude, les chiens vivants dans l’usine, nourris par les ouvriers, étaient plus consanguins et de type berger allemand. Quelques kilomètres plus loin, dans la ville de Tchernobyl évacuée après l’explosion, où 50 000 personnes habitaient en 1986, les chiens ressemblaient plus à des individus « modernes », avec un mélange de races plus importants. Ils ont identifié 15 familles sur les 302 individus, la plus grande couvrant la centrale nucléaire directement. À Slavutych, la ville construite en quelques mois pour accueillir les expulsés de Tchernobyl, qui se trouve à 45 km, les chiens identifiés ne possédaient pas de « liens de parenté » avec ceux plus proches de la centrale.
Cette étude présente la première caractérisation d’une espèce domestique à Tchernobyl, établissant son importance pour les études génétiques sur les effets de l’exposition à long terme aux rayonnements ionisants à faible dose. Par ailleurs, ils ont aussi démontré que les chiens vivants au plus proche de l’épicentre portaient toujours des traces de l’irradiation telles que des dépôts de césium-137. Ce taux est plus de 200 fois plus que ceux vivants à quelques dizaines de kilomètres. Cette étude est la première d’un gigantesque chantier génétique. Pourtant, les chercheurs n’arrivent pas encore à comprendre comment ces chiens parviennent à survivre avec un taux de césium-137 si important dans le sang. Ce sera l’objet d’une prochaine étude évidemment. Plus d’informations : science.org / nature.com