Il s’agit d’une première mondiale pour la communauté médicale et scientifique : des médecins sont parvenus à utiliser l’outil génétique CRISPR pour injecter des fragments d’ADN dans l’œil d’une personne bien vivante. Pour rappel, le CRISPR est une espèce de « ciseaux moléculaires » qui permet de découper avec précision des séquences d’ADN.
Les essais cliniques ont été menés par des scientifiques de l’Oregon Health & Science Institute (OHSU) à Portland, Etats-Unis, dans l’espoir de guérir l’amaurose congénitale de Leber, une maladie génétique très rare qui rend malvoyant ou complètement aveugle dès la naissance. Jusqu’à présent, aucun traitement viable n’a été trouvé pour renverser le processus et restaurer la vision chez les personnes atteintes de cette maladie alors incurable.
Les chercheurs de l’OHSU ont utilisé l’outil CRISPR pour injecter directement dans le globe oculaire du patient trois gouttes de liquide contenant des fragments d’ADN. Pour ce faire, les médecins ont commencé par placer le patient sous anesthésie générale. Ils ont ensuite pratiqué de minuscules trous dans le blanc de l’œil pour y déposer les gouttelettes sous la rétine. Il est à noter que les gouttes en question sont un traitement expérimental appelé AGN-151587 et développé par des sociétés de biotechnologie tels qu’Editas Medecine.
Les tests cliniques ont d’ailleurs été menés en collaboration avec Editas Medicine mais aussi avec la société pharmaceutique Allergan et plusieurs centres ophtalmologiques. Le patient été opéré à l’Institut Casey Eye de l’OHSU. Pour l’heure, les médecins n’ont pas encore donné de détails sur son état et les effets du traitement. Ils ont juste annoncé que pendant un an après la chirurgie, les yeux et la vision du patient seront surveillés de près.
Modifier l’ADN pour rendre la vue
Néanmoins, pour Charles Albright, le Directeur scientifique d’Editas Medecine, le fait qu’ils aient pu utiliser le CRISPR sur une personne vivante est une véritable avancée pour la médecine. « Nous avons littéralement le potentiel de rendre la vue à des personnes qui sont essentiellement aveugles ! » s’est-il félicité. « Nous pensons que cela pourrait aboutir à un tout nouvel ensemble de médicaments pour entrer dans et modifier l’ADN. »
Jason Comander, Directeur associé des troubles héréditaires de la rétine et un des principaux meneurs des tests cliniques, va également dans ce sens. « Cela marque une nouvelle ère en médecine où nous pouvons tester des outils pour accéder et traiter la cause profonde d’une maladie génétique dans le corps d’une personne », a-t-il affirmé.
L’outil CRISPR pourrait en effet être utilisé pour traiter les maladies génétiques à la source même, en supprimant la mutation défectueuse du/des gènes qui causent leur apparition. Les recherches se poursuivent pour perfectionner ce nouveau type de traitement.